A la Folie
" A La Folie "
de
Pascal Marmet
« Ce qui est créé par l’esprit est plus vivant que la matière. »
Charles Baudelaire
« Impossible de bouger. Son corps était enfermé dans une coque, coulé dans une dalle de béton ou ligoté à la morgue. Avait-elle encore ses membres ? Etait-elle amputée ? Elle entendit ses dents claquer. Elle avait peur. En s’agitant, elle comprit qu’elle était sanglée dans une camisole de force et que ses chevilles étaient entravées…Sans prévenir, un marteau-piqueur défonçait ses tempes …
A chaque inspiration trop forte, le voile blanc épousait son visage, se collait à ses narines en lui larguant des émanations de plastique qui lui soulevait le cœur …A bout de souffle, elle se cambra avec un cri étouffé. Sa poitrine s’écrasa enfin contre un mur d’acier. Elle savait qu’elle était enfermée dans un tiroir …Murée dans une boîte froide, emballée dans un sac en plastique qui lui collait à la peau. »
Ludmilla :
« Pascal Langle. Il porte le numéro onze, et me libère du dix… »
Bombe à retardement le cahier nr 11 est tombé comme météorite dans la vie de Pascal Langle, gérant d’un théâtre de Nice, veuf depuis 10 ans d’une compagne ex-ceptionnelle, un héritage reçu chez Maître Saltz…
La porte s’ouvre brutalement devant lui. Quelqu’un rentre comme une furie, le cahier lui échappe des mains et s’ouvre sur l’écriture ronde de Ludmilla.
Le fantôme du passé s’est répandu sur chaque millimètre de sa peau… Le passé devenu le fossoyeur du présent, coupe ses appétits, étrangle son action et il reste prostré dans un silence d’amour. « Je vais revoir ce cahier nr 11, ce cahier d’ébène, le toucher, caresser Ludmilla, plonger dans ses secrets alors que nous ne pourrons plus parler ensemble pour nous libérer du fardeau de nos silences. »
La furie croisée chez le notaire, Joanna Marcus, pigiste, une nanoparticule, électron libre, elle a bientôt vingt-deux ans,sans un centime, orpheline, elle s’est faite toute seule et du haut de son mètre soixante-dix-sept les bras levés, elle pénètre le Géant, la rédaction du Magazine L, ce sera pour en sortir avec un pass VIP pour une vie meilleure.
Joanna alias Julia, écrit avec un sens suraigu de la critique, plume impertinente, une résilience à toute épreuve, elle se défoule sur la gloss attitude, mode de pacotille des riches maisons de haute couture, elle, qui n’a jamais eu le nounours articulé des vitrines de Noël des Galeries Lafayette.
Chez le notaire elle reçoit le cahier nr 3, elle ne manque pas de faire la relation avec cet homme qui avait laissé tomber un cahier noir …Curieuse et affûtée, avec un subterfuge elle acquière son numéro de portable !
A partir de cette bousculade, la tornade va s’inviter chez vous, cambriolage sans mobile apparent, voiture forcée, courses poursuites, incendie volontaire, le sommeil va jouer avec vos nerfs ; comme un stylo infrarouge sur un document crypté, votre oeil scanne le texte au peigne fin.
Jusqu’au chapitre « Clémence », le lecteur imagine de lui-même la suite du récit …C’est sans compter sur la perspicacité de l’auteur qui fait écrouler votre château de carte en moins de deux…non vous ne n’aurez pas l’occasion de connaître le contenu de ces cahiers, quelqu’ange déchu s’amuse à vous les supprimer au fur et à mesure du récit …
Le roman va-t-il s’évaporer sans objet ? « Perfect sense » what else ?
Dans ce roman le héros virtuel est un Docteur en biologie cellulaire …
Quand le mieux est l’ennemi du bien, l’homme se prend pour Dieu, la science dérape et vous penserez sans aucun doute qu’il y a plus de fous dehors que dedans.
On ne peut s’empêcher d’imaginer l’auteur Pascal Marmet, BCBG (bon chic, bon genre), dégustant son premier café du matin à la terrasse ensoleillée de son Hôtel Aria, s’agrippant de manière coutumière à la presse, Nice Matin, mains courantes qui l’arriment à l’actualité, tout en se cachant derrière les pages, glissant de temps à autre un regard timide sur le Nice people… c’est de là qu’il tire ses descriptions modistes très pertinentes, une vraie campagne publicitaire, et sans aucun doute ses futurs lecteurs, chacun cherchant à savoir, s’il apparaîtra ou pas dans son prochain roman.
Les auteurs on sait ce qu’ils écrivent, mais pas ce qu’il font !
Troublant roman, chaque chapitre s’ écrit à la première personne " Je",
un « Je » multiple….Il cache à tour de rôle l’un des acteurs glamours de ce policier psychiatrique,des citations étranges signées ‘L ‘ de Lucy ou de Lu… vous mettent en quinconce sur votre chaise, tels de petits cailloux blancs dans la nuit noire, de bribes de phrase des cahiers numérotés s’offrent à vous…
« Et secouer les idées mortes et noires, celles qui tournent à l’obsession » Ludm.
L’auteur crée le suspense en vous y mettant des mots qui ne vous éclairent vraiment que rétroactivement …
Au chapitre « puzzle », vous réalisez que le ‘L’ ‘Lu’ ‘Lud’ ‘Ludm’ est devenu ‘Ludmilla’ HA !!!!! Vous pensez avoir saisi quelques astuces sur le contenu des cahiers et bien « NON !».
Le « méchant docteur est déjà mort depuis longtemps »… il y a donc une autre protagoniste qui poursuit le projet …Mais laquelle ?
La traçabilité médicamenteuse ou agroalimentaire au 21 ème siècle est devenue une obsession face aux nombreux cas d’encéphalite spongieuse bovine, l’auteur qui connaît bien les inspecteurs de la santé publique et INRA , en a fait ses choux gras…
« Isolé un anti-corps, qui détruit toutes les menaces microbiennes les plus tenaces en développant un faux message avant de l’attaquer, puis répare le système immunitaire sans laisser de traces…une assurance vie innée ! »
Ni vu, ni connu !
Toutes les traces des méfaits sont systématiquement détruites au court du récit, le passé ruine le présent à tel point que le roman pourrait s’arrêter de façon séquentielle.
Pascal Marmet est un fin stratège, en tournant la page suivante, un nouvel acteur apparaît sur fond d’actualités brûlantes. Les trois jeunes filles, Marie-Ange Boudelot, Joanna Marcus, et Clémence de Claverie n’ont qu’à bien se tenir, laboratoire vivant à leur insu, elles portent en elles la solution à une maladie biochimique engendrée par un trouble de la dopamine tout en apportant une solution à la pathologie bipolaire …
Il fallait y penser ! Mais c’est sans compter sur l’obsolescence non-programmée de cette découverte qui rend l’innovation scientifique infertile, s’autodétruisant d’elle-même.
Une hypothèse scientifique n’est prouvée que si l’on peut répéter l’expérience, celle-ci peut contribuer à établir la vérité des prémisses d'un raisonnement démonstratif.
Rassurez-vous nul n’est besoin de vous faire prescrire un anxiolytique pour achever la lecture de ce roman, en fin de parcours, l’auteur vous met la trouille en fuite avec un dénouement rebondissant …Vous pourrez effacer de votre mémoire votre cauchemar étourdissant :
‘ Tout est bien qui finit bien ’ à Vous de le découvrir en vous procurant le livre :
" A la folie"
Auteur : Pascal Marmet
Editions : France-Empire
ISBN : 978-2-7048 -1119-9
19 euros TTC
Quelques questions surgissent après lecture :
Rendre la vie à quelqu’un, vous donne-t-il des droits sur cette personne ?
L’imagination joue-t-elle le même rôle dans la création littéraire que dans la découverte scientifique ?
Suis-je ce que j’ai consciente d’être ?
Le progrès scientifique et technique suscitent-t-ils de nouvelles questions philosophiques ?
Etant donné que toutes les découvertes scientifiques passées ont été remises en question, l’idée de vérité n’est-elle qu’une utopie, à bannir de la conscience du savant ?
Des découvertes récentes en biologie cellulaire suggèrent-elles que la vie au niveau moléculaire et microscopique n’aurait pas pu apparaître comme le darwinisme le prétend avec insistance ?
© Marie-christine Dehove pour frenchwritersworldwide.com
" A la Folie " livre sélectionné pour le livre du mois d' avril 2012.
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